Nécrologie de Henry Kissinger

Henry Kissinger est décédé le mercredi 29 novembre 2023 dans sa maison du Connecticut. Géant de la diplomatie américaine et maître en matière de relations internationales, il était à la fois admiré et controversé. Il était âgé de 100 ans.

Henry Kissinger

Henry Kissinger, de la science politique à la fonction d’état

Henry Kissinger, de son nom de naissance Heinz Alfred Kissinger, est né le 27 mai 1923 à Fürth, en Allemagne. D’origine juive, sa famille fuit les persécutions nazies et émigre aux États-Unis en 1938. Il est naturalisé américain en 1943. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il devient interprète des services secrets militaires et obtient la Bronze Star Medal. De retour aux États-Unis, il suit des cours de science politique à Harvard. Il obtient son doctorat en 1954 avec une thèse traitant de la diplomatie entre 1812 et 1822. En 1957, il devient directeur adjoint au département des études gouvernementales, après avoir été professeur. Entre-temps, il est nommé consultant à l'Operations Coordinating Board du Conseil de sécurité nationale et directeur d'étude des Affaires étrangères et Armes nucléaires au Conseil des relations étrangères. Une fonction sur laquelle il écrit un livre paru l’année suivante, Nuclear Weapons and Foreign Policy, qui met en exergue les avantages d’une riposte graduée.

Pour satisfaire son ambition politique, Henry Kissinger intègre le parti républicain et entretient des relations avec des hommes politiques. Il les conseille en agissant hors du circuit politique officiel. Il s’agit notamment de Nelson Rockefeller, Dwight D. Eisenhower, John Fitzgerald Kennedy ou encore Lyndon B. Johnson. Il devient par la suite administrateur de Rockefeller Brothers Fund et de Gulfstream Aerospace Corporation. En 1951, il est nommé directeur du Programme d'études de Défense de Harvard et directeur du Séminaire international de la même académie. Des postes qu’il quitte en 1971. Entre-temps, il est nommé conseiller de nombreuses agences gouvernementales, dont le département d'État des États-Unis. En 1968, pour les élections présidentielles, Henry Kissinger devient conseiller du candidat Richard Nixon qui, une fois élu, le nomme conseiller à la sécurité nationale. Il est la 8e personne des États-Unis occupant ce poste.

Ses opinions sont respectées en matière de relations internationales, de politique et de géopolitique.

Henry Kissinger, de l’administration Nixon à celle de Ford

En tant que conseiller à la sécurité nationale en pleine guerre froide, Henry Kissinger s’attèle à mettre au point une politique de détente. Il négocie ainsi le traité SALT I (Strategic Arms Limitation Tlaks) : une négociation sur la limitation des armes stratégiques offensives, dont la limitation des bombes nucléaires. Il entre également en contact avec les dirigeants de la Chine Communiste et permet la première visite officielle d’un président américain (1972). Il accompagne d’ailleurs le président Richard Nixon à cet évènement historique.

En 1973, Henry Kissinger est l’un des artisans de la signature des accords de paix de Paris, ce qui lui vaut le prix Nobel de la paix. Une récompense fortement décriée, car la paix n’a pas réellement été rétablie. Mais Henry Kissinger ne se décourage pas. Il négocie un cessez-le-feu entre l’Israël et l’Égypte, jouant ainsi un rôle important dans la fin de la guerre du Kippour. Au mois de septembre 1973, il est nommé secrétaire d’État, le 56e des États-Unis. S’il est critiqué pour ses liens étroits avec des pays étrangers, Henry Kissinger est le seul à ne pas être mis en cause lorsqu’éclate le scandale du Watergate. Malgré la démission de Richard Nixon, Henry Kissinger garde son poste de secrétaire d’État mais quitte sa fonction de conseiller à la sécurité nationale sous l’administration Gerald Ford. Les deux rencontrent le président Indonésien en vue de l’unification de l’île Timor, ce qui a conduit au massacre des habitants de l’île par les soldats indonésiens. Henry Kissinger nie toute implication dans cette affaire. En 1976, il réussit à faire plier le premier ministre de Rhodésie pour appliquer la loi internationale et le principe de la majorité « un homme, un vote ». Henry Kissinger quitte sa fonction de secrétaire d’État en 1977. Pour autant, il joue un rôle important à l’élection de Ronald Reagan (1980) grâce à la mobilisation de tout son réseau. En 1983, il dirige Kissinger Associates qui fait partie du Council of the Americas. Il garde une influence sur la politique étrangère de l'administration Obama et sur les relations américano-russes. En effet, Henry Kissinger continue de conseiller des hommes politiques en dehors des circuits officiels.

Si Henry Kissinger n’avait plus de rôle officiel sur le plan politique, il était toujours sollicité par le tout New-York. Ses opinions sont respectées en matière de relations internationales, de politique et de géopolitique. Lors de la pandémie de Covid 19, il n’avait pas hésité à donner son avis sur les actions que l’administration devrait adopter en vue du changement de l’ordre mondial inévitable. Auteur d’une vingtaine d’ouvrages sur la politique, Henry Kissinger n’avait jamais cessé d’être le conseiller qu’il fut.